Reprendre la parole après un AVC : comment démarrer l’orthophonie

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“Je sais ce que je veux dire, mais les mots ne sortent pas.” “Les gens me parlent, mais je ne comprends plus ce qu’ils disent.” “Ma bouche ne fait plus ce que je veux.” Ces phrases, de nombreux patients les prononcent (ou aimeraient les prononcer) après un AVC. Les troubles du langage et de la parole touchent environ 30% des personnes ayant subi un accident vasculaire cérébral. Que ce soit l’aphasie (difficulté à comprendre ou à produire le langage), la dysarthrie (difficulté à articuler), ou la dysphonie (troubles de la voix), ces troubles peuvent profondément bouleverser la communication, l’identité, et la vie sociale. Mais voici une bonne nouvelle : le cerveau peut réapprendre à parler. L’orthophonie, démarrée précocement et pratiquée régulièrement, permet des progrès remarquables. Dans cet article complet, nous vous expliquons ce que sont les troubles du langage après un AVC, comment fonctionne l’orthophonie, et surtout, comment vous pouvez commencer à travailler dès maintenant, avec ou sans orthophoniste, pour reprendre la parole.

Comprendre les troubles du langage et de la parole après un AVC

Les différents types de troubles

Après un AVC, plusieurs types de difficultés peuvent apparaître. Il est important de bien les distinguer car elles ne nécessitent pas les mêmes approches :

L’aphasie : quand le langage est touché

Qu’est-ce que c’est ?

L’aphasie est un trouble du langage causé par une lésion des zones du cerveau dédiées au langage (généralement l’hémisphère gauche). Ce n’est pas un problème d’intelligence, de mémoire générale, ou de motivation. Le patient sait ce qu’il veut dire, mais le mécanisme du langage est perturbé.

Les zones cérébrales impliquées :

  • Aire de Broca (partie frontale gauche) : production du langage
  • Aire de Wernicke (partie temporale gauche) : compréhension du langage
  • Les connexions entre ces deux zones
  • Les différents types d’aphasie :

    Aphasie de Broca (ou aphasie d’expression) :

  • Difficulté à produire le langage : les mots ne sortent pas, ou sortent mal
  • La compréhension est relativement préservée (vous comprenez ce qu’on vous dit)
  • Langage télégraphique : phrases courtes, manque de petits mots (“je veux boire” devient “moi… boire”)
  • Difficultés à trouver ses mots (manque du mot)
  • Grande frustration car le patient est conscient de ses difficultés
  • Exemple : Vous voulez dire “Je voudrais un verre d’eau s’il vous plaît” mais vous dites “Moi… eau… euh… boire”.

    Aphasie de Wernicke (ou aphasie de compréhension) :

  • Difficulté à comprendre le langage : ce que les autres disent semble être du charabia
  • Production fluide mais incohérente : les phrases sont longues mais ne veulent rien dire (jargon)
  • Utilisation de mots inexistants (néologismes) ou de mots à la place d’autres (paraphasies)
  • Pas ou peu de conscience du trouble (anosognosie)
  • Exemple : On vous demande “Voulez-vous du café ?” et vous ne comprenez pas. Vous répondez “Oui, le frolin dans la maison grande avec les pommes” (phrase fluide mais incompréhensible).

    Aphasie globale :

  • Atteinte sévère de la production ET de la compréhension
  • Peu ou pas de langage
  • Généralement associée à des AVC étendus
  • Pronostic plus réservé, mais des progrès restent possibles
  • Aphasie de conduction :

  • Difficulté à répéter ce qu’on vient d’entendre
  • Compréhension et expression relativement préservées
  • Difficulté à trouver le bon mot (paraphasies)
  • La dysarthrie : quand la bouche ne répond plus

    Qu’est-ce que c’est ?

    La dysarthrie est un trouble de l’articulation causé par une faiblesse ou un manque de coordination des muscles de la parole (lèvres, langue, joues, palais, cordes vocales, respiration).

    Important : dans la dysarthrie, le langage lui-même n’est pas touché. Vous savez quel mot utiliser, vous savez construire des phrases, mais votre bouche ne peut pas produire correctement les sons.

    Les signes :

  • Parole pâteuse, difficile à comprendre
  • Voix faible ou étouffée
  • Difficulté à contrôler le débit (trop rapide ou trop lent)
  • Bavage (difficulté à contrôler la salive)
  • Difficulté à mâcher et à avaler (dans les formes sévères)
  • Exemple : Vous voulez dire “bonjour” mais cela sort “ponchour” ou de façon indistincte.

    La dysphonie : troubles de la voix

    Qu’est-ce que c’est ?

    Problèmes au niveau de la voix elle-même :

  • Voix rauque, voilée
  • Voix très faible (hypophonie)
  • Difficulté à moduler la voix (monotonie)
  • Voix qui se fatigue rapidement
  • L’apraxie de la parole

    Qu’est-ce que c’est ?

    Difficulté à programmer et à coordonner les mouvements nécessaires pour parler, alors que les muscles eux-mêmes fonctionnent bien.

    Le patient sait ce qu’il veut dire, ses muscles sont capables de bouger, mais le cerveau ne parvient pas à coordonner les mouvements dans le bon ordre.

    Les signes :

  • Erreurs inconstantes (parfois le mot sort bien, parfois non)
  • Recherche d’articulation visible (on voit que la personne “cherche” comment positionner sa bouche)
  • Meilleure réussite dans les situations automatiques (“bonjour”, “merci”) que volontaires
  • L’impact psychologique et social

    Au-delà de la difficulté technique à parler, les troubles du langage ont un impact profond :

    Sur l’identité : “Je ne me reconnais plus. Ma voix, mes mots, c’est une partie de moi.”

    Sur l’estime de soi : sentiment d’infantilisation, honte, perte de confiance.

    Sur les relations : difficultés de communication avec les proches, incompréhensions, tensions.

    Sur l’isolement social : tendance à éviter les interactions, retrait, solitude.

    Sur l’autonomie : difficultés pour les démarches administratives, les achats, le téléphone.

    La frustration immense : savoir ce qu’on veut dire sans pouvoir le dire est extrêmement frustrant et épuisant.

    Le rôle crucial de l’entourage

    L’entourage joue un rôle majeur dans la récupération :

  • Soutien émotionnel
  • Adaptation de la communication
  • Encouragement et patience
  • Stimulation quotidienne
  • Mais l’entourage peut aussi, sans le vouloir, agir de manière contre-productive :

  • Parler à la place du patient
  • Infantiliser (“tu veux ça ? oui ou non ?”)
  • S’impatienter
  • Éviter de communiquer
  • L’équilibre est délicat : aider sans faire à la place, encourager sans mettre la pression.

    Formation AVC DYNSEO

    Pour mieux comprendre les troubles du langage et de la communication après un AVC, la formation DYNSEO sur l’AVC propose un module complet sur les séquelles cognitives et langagières. Vous y apprendrez comment l’AVC affecte la parole, comment communiquer efficacement, et comment accompagner au mieux la rééducation.

    Qu’est-ce que l’orthophonie et comment ça marche ?

    Le rôle de l’orthophoniste

    L’orthophoniste est le professionnel spécialisé dans les troubles de la communication, du langage, de la parole, et de la déglutition.

    Son rôle après un AVC :

    Évaluation :

  • Bilan complet des capacités et difficultés
  • Compréhension du langage oral et écrit
  • Expression orale et écrite
  • Articulation, voix
  • Déglutition
  • Rééducation :

  • Séances individuelles personnalisées
  • Exercices ciblés selon les difficultés
  • Apprentissage de stratégies compensatoires
  • Réentraînement progressif
  • Accompagnement :

  • Soutien psychologique
  • Conseils à l’entourage
  • Adaptation des outils de communication
  • Coordination :

  • Lien avec l’équipe médicale
  • Orientation vers d’autres professionnels si nécessaire (neuropsychologue, ergothérapeute)
  • Quand commencer l’orthophonie ?

    Le plus tôt possible :

  • Dès la phase hospitalière, l’orthophoniste peut intervenir (bilan de déglutition, stimulation précoce)
  • Dès la sortie de l’hôpital : prescription de séances
  • Plus la rééducation démarre tôt, meilleurs sont les résultats
  • La fenêtre de récupération maximale :

  • Les 3 à 6 premiers mois sont cruciaux (neuroplasticité maximale)
  • Mais des progrès restent possibles bien au-delà (jusqu’à 2 ans et plus)
  • L’important : commencer tôt et maintenir la régularité
  • À quelle fréquence ?

    Recommandations :

  • Phase aiguë (premiers mois) : 3 à 5 séances par semaine (idéalement quotidien si possible)
  • Phase de consolidation (6 mois à 1 an) : 2 à 3 séances par semaine
  • Entretien (au-delà) : 1 à 2 séances par semaine, ou moins si les progrès sont stables
  • Durée des séances : 30 à 45 minutes en général.

    Important : la rééducation ne se limite pas aux séances avec l’orthophoniste. Le travail quotidien à domicile est essentiel.

    Comment se déroule une séance ?

    Accueil et discussion :

  • Point sur la semaine écoulée
  • Difficultés rencontrées
  • Progrès observés
  • Exercices ciblés :

  • Selon le type de trouble et les objectifs
  • Variés pour maintenir la motivation
  • Adaptés à votre niveau du jour (si vous êtes fatigué, l’orthophoniste adapte)
  • Mise en situation :

  • Conversation, jeux de rôle, lecture, écriture
  • Applications pratiques des exercices
  • Conseils et devoirs :

  • Exercices à faire à la maison
  • Stratégies à appliquer au quotidien
  • Implication de l’entourage
  • Ambiance bienveillante :

  • Pas de jugement
  • Encouragement
  • Droit à l’erreur
  • Combien de temps dure la rééducation ?

    Cela dépend :

  • De la sévérité des troubles
  • De la précocité et de la régularité de la rééducation
  • De votre motivation et de votre pratique quotidienne
  • De votre âge et de votre état général
  • Du soutien de l’entourage
  • Durée typique :

  • Troubles légers : 3 à 6 mois
  • Troubles modérés : 6 mois à 1 an
  • Troubles sévères : 1 à 2 ans, voire plus
  • Important : même si des séquelles persistent, des progrès continuent au-delà de ces délais. Ne jamais abandonner !

    Est-ce que ça marche vraiment ?

    OUI ! Les études scientifiques et l’expérience clinique le démontrent :

    Facteurs de bon pronostic :

  • Début précoce de la rééducation
  • Rééducation intensive et régulière
  • Jeune âge
  • AVC de petite taille
  • Bon état cognitif général
  • Motivation du patient
  • Soutien familial
  • Résultats typiques :

  • Environ 60 à 70% des patients aphasiques récupèrent une communication fonctionnelle
  • Les progrès sont souvent importants les 3 premiers mois, puis continuent plus lentement
  • Même les troubles sévères peuvent s’améliorer significativement
  • Attention : chaque AVC est unique. Votre récupération ne sera pas forcément comme celle des autres. Comparez-vous à vous-même, pas aux autres.

    Trouver et choisir son orthophoniste

    Comment trouver un orthophoniste ?

    Prescription médicale :

  • Votre médecin (généraliste ou neurologue) vous fait une ordonnance
  • Prescription généralement pour 30 à 50 séances (renouvelable)
  • Où chercher :

  • Demandez à votre médecin, à l’hôpital (ils ont souvent des contacts)
  • Annuaire de l’Ordre des orthophonistes : www.fno.fr
  • Bouche-à-oreille (autres patients, associations)
  • Cabinets libéraux, centres de santé, hôpitaux de jour
  • Orthophoniste à domicile :

  • Possible si vous avez des difficultés à vous déplacer
  • Précisez-le sur l’ordonnance
  • Les critères de choix

    Expérience en neurologie :

  • Tous les orthophonistes ne sont pas spécialisés en AVC
  • Demandez leur expérience avec des patients post-AVC
  • Proximité géographique :

  • Les séances sont fréquentes, privilégiez la proximité
  • Surtout si vous avez des difficultés à vous déplacer
  • Le feeling :

  • La relation thérapeutique est importante
  • Vous devez vous sentir en confiance, écouté, respecté
  • Si le courant ne passe pas, n’hésitez pas à changer (après en avoir discuté)
  • La disponibilité :

  • Délai d’attente (dans certaines régions, c’est long)
  • Horaires compatibles avec votre emploi du temps
  • Le remboursement

    Prise en charge à 100% en ALD (Affection Longue Durée) :

  • L’AVC fait partie des ALD
  • Demandez à votre médecin de remplir le protocole ALD
  • Les séances d’orthophonie sont alors remboursées à 100% par l’Assurance Maladie
  • Pas d’avance de frais si l’orthophoniste pratique le tiers payant
  • Sans ALD :

  • Remboursement à 60% par l’Assurance Maladie
  • Le reste peut être pris en charge par votre mutuelle
  • Exercices à faire seul ou avec un proche : démarrer dès maintenant

    Même si vous n’avez pas encore vu d’orthophoniste, ou en complément des séances, vous pouvez commencer à travailler dès maintenant.

    Principes généraux :

  • Régularité : mieux vaut 15 minutes par jour que 2 heures une fois par semaine
  • Progressivité : commencez facile et augmentez la difficulté
  • Bienveillance : droit à l’erreur, pas de pression
  • Variété : alternez les types d’exercices pour ne pas vous lasser
  • Pour l’aphasie de Broca (difficulté d’expression)

    Exercice 1 : Dénomination d’images

    Objectif : retrouver les mots.

    Matériel : images (magazines, catalogues, cartes, ou images sur internet).

    Comment faire :

    Niveau 1 :

  • Regardez une image simple (ex : pomme)
  • Essayez de dire le mot
  • Si ça ne vient pas, le proche donne la première syllabe : “po…”
  • Si ça ne vient toujours pas, le proche dit le mot et vous le répétez
  • Niveau 2 :

  • Images plus complexes (actions, scènes)
  • Essayez de faire une phrase simple : “Le chat dort”
  • Niveau 3 :

  • Décrivez l’image avec plusieurs phrases
  • Racontez une petite histoire
  • Astuce : commencez par des catégories familières (objets de la maison, aliments, animaux).

    Fréquence : 10-15 minutes par jour.

    Exercice 2 : Compléter des phrases

    Objectif : faciliter la production en donnant un contexte.

    Comment faire :

    Le proche commence une phrase très prévisible, vous la complétez :

    Exemples :

  • “Le ciel est…” → bleu
  • “Je me brosse les…” → dents
  • “On coupe avec des…” → ciseaux
  • “Le soleil brille pendant le…” → jour
  • Niveau 2 :

  • Phrases moins prévisibles
  • “Mon plat préféré est…”
  • “Hier, j’ai…”
  • Fréquence : 5-10 minutes par jour.

    Exercice 3 : Chant et automatismes

    Objectif : utiliser les zones cérébrales préservées (la musique et les automatismes verbaux).

    Comment faire :

    Chansons connues :

  • Chantez des chansons de votre jeunesse
  • Le proche chante avec vous
  • Souvent, les paroles reviennent plus facilement en chanson !
  • Automatismes :

  • Comptez : 1, 2, 3… jusqu’à 10, 20
  • Jours de la semaine : lundi, mardi…
  • Mois de l’année
  • Votre adresse, votre date de naissance
  • Fréquence : quotidienne (et par plaisir !).

    Exercice 4 : Écriture

    Objectif : parfois, l’écrit est plus accessible que l’oral.

    Comment faire :

    Niveau 1 :

  • Écrivez des mots sous des images
  • Copiez des phrases
  • Niveau 2 :

  • Écrivez votre prénom, votre adresse
  • Écrivez une liste de courses
  • Écrivez ce que vous avez fait dans la journée (journal)
  • Niveau 3 :

  • Écrivez une carte postale, un mail
  • Racontez un souvenir
  • Astuce : si vous ne pouvez pas écrire à la main, utilisez un clavier d’ordinateur ou de tablette.

    Fréquence : 10 minutes par jour.

    Pour l’aphasie de Wernicke (difficulté de compréhension)

    Exercice 5 : Compréhension d’ordres simples

    Objectif : améliorer la compréhension du langage oral.

    Comment faire :

    Niveau 1 :

    Le proche donne des ordres très simples, vous les exécutez :

  • “Levez la main”
  • “Touchez votre nez”
  • “Fermez les yeux”
  • Niveau 2 :

    Ordres avec un objet :

  • “Montrez-moi le stylo”
  • “Donnez-moi le livre”
  • Niveau 3 :

    Ordres en deux temps :

  • “Prenez le stylo et posez-le sur la table”
  • “Touchez votre oreille puis levez la main”
  • Fréquence : 10 minutes par jour.

    Exercice 6 : Association image-mot

    Objectif : améliorer la compréhension écrite et orale.

    Matériel : images et mots écrits.

    Comment faire :

    Niveau 1 :

  • Le proche montre une image (chat)
  • Le proche dit “chat”
  • Vous associez le son au sens
  • Niveau 2 :

  • Le proche dit “chat” sans montrer l’image
  • Vous désignez l’image correspondante parmi plusieurs
  • Niveau 3 :

  • Mots écrits : vous lisez “chat” et désignez l’image
  • Fréquence : 15 minutes par jour.

    Exercice 7 : Questions oui/non

    Objectif : compréhension de questions simples.

    Comment faire :

    Le proche pose des questions auxquelles on répond par oui ou non :

  • “Est-ce que le ciel est bleu ?” → oui
  • “Est-ce qu’un chat a des ailes ?” → non
  • “Est-ce que vous aimez le café ?” → oui/non selon vos goûts
  • Progression : questions de plus en plus complexes.

    Fréquence : 10 minutes par jour.

    Pour la dysarthrie (difficulté d’articulation)

    Exercice 8 : Mouvements de la bouche (praxies bucco-faciales)

    Objectif : renforcer et mobiliser les muscles de la parole.

    Comment faire :

    Devant un miroir, faites ces mouvements 10 fois chacun :

    Lèvres :

  • Sourire largement
  • Faire la moue (lèvres en avant)
  • Alterner sourire/moue
  • Gonfler les joues
  • Faire passer l’air d’une joue à l’autre
  • Langue :

  • Tirer la langue
  • Toucher le nez avec la langue
  • Toucher le menton
  • Passer la langue sur les dents (dehors et dedans)
  • Claquer la langue
  • Mâchoire :

  • Ouvrir grand la bouche
  • Mâcher exagérément (comme si vous mâchiez un chewing-gum)
  • Fréquence : 2-3 fois par jour, 5-10 minutes.

    Exercice 9 : Articulation des sons

    Objectif : améliorer la précision de l’articulation.

    Comment faire :

    Niveau 1 : Sons isolés

  • Répétez chaque son 10 fois : AAAA, EEEE, IIII, OOOO, UUUU
  • Puis consonnes : P, T, K, B, D, G, F, V, S, Z, CH, J, L, R
  • Niveau 2 : Syllabes

  • PA, TA, KA, BA, DA, GA
  • PO, TO, KO, BO, DO, GO
  • PI, TI, KI, BI, DI, GI
  • Niveau 3 : Mots courts

  • Papa, toto, bébé
  • Puis mots de plus en plus longs
  • Niveau 4 : Phrases courtes

  • “Le chat dort”
  • “Je vais bien”
  • Puis phrases de plus en plus longues
  • Astuce : articulez de manière exagérée au début, même si ça semble bizarre.

    Fréquence : 10-15 minutes par jour.

    Exercice 10 : Virelangues (progressivement)

    Objectif : améliorer la précision et la vitesse d’articulation.

    Comment faire :

    Commencez TRÈS lentement et clairement. Augmentez progressivement la vitesse.

    Exemples faciles :

  • “Un bon bol de bon bouillon”
  • “Trois petits chats”
  • “Papa peint la porte”
  • Exemples plus difficiles :

  • “Un chasseur sachant chasser”
  • “Les chaussettes de l’archiduchesse”
  • Fréquence : 5 minutes par jour (une fois que vous maîtrisez les exercices précédents).

    Exercices pour tous les types de troubles

    Exercice 11 : Lecture à voix haute

    Objectif : travailler l’articulation, la fluence, la prosodie (intonation).

    Comment faire :

    Niveau 1 :

  • Lisez des phrases simples
  • Prenez votre temps
  • Articulez bien
  • Niveau 2 :

  • Lisez un paragraphe
  • Faites attention à l’intonation (points, virgules)
  • Niveau 3 :

  • Lisez un article de journal, un chapitre de livre
  • Variez le ton selon le contenu
  • Astuce : enregistrez-vous et réécoutez-vous pour identifier les progrès et les points à travailler.

    Fréquence : 10-20 minutes par jour.

    Exercice 12 : Conversation quotidienne

    Objectif : mettre en pratique les acquis dans une situation réelle.

    Comment faire :

    Chaque jour, ayez une vraie conversation avec un proche sur un sujet qui vous intéresse :

  • Vos activités de la journée
  • Un souvenir
  • Un sujet d’actualité
  • Vos projets
  • Règles pour le proche :

  • Laissez le temps de répondre (ne pas finir les phrases)
  • Reformulez si vous n’avez pas compris (plutôt que demander de répéter)
  • Encouragez, souriez, montrez de l’intérêt
  • Ne corrigez pas systématiquement les erreurs (sauf si demandé)
  • Fréquence : quotidienne, 15-30 minutes.

    Exercice 13 : Jeux de société

    Objectif : stimulation ludique et sociale du langage.

    Jeux recommandés :

    Scrabble : vocabulaire, orthographe

    Bac/Petit bac : trouver des mots par catégorie

    Pictionary : dénomination, description

    Jeux de cartes : nommer les cartes, compter

    Trivial Pursuit : connaissances générales, compréhension de questions

    Fréquence : 2-3 fois par semaine.

    JOE, votre coach cérébral

    Pour compléter votre rééducation orthophonique, JOE, votre coach cérébral propose des jeux qui stimulent le langage de manière ludique :

  • Fluence verbale : trouver le maximum de mots d’une catégorie
  • Dénomination : nommer des objets, des images
  • Compréhension : suivre des instructions
  • Mémoire verbale : retenir des listes de mots
  • Ces jeux s’adaptent automatiquement à votre niveau et vous permettent de travailler 10-15 minutes par jour, en complément des séances d’orthophonie et des exercices “papier”.

    Conseils pour améliorer la communication au quotidien

    Pour la personne aphasique

    Prenez votre temps :

  • Ne vous précipitez pas
  • Respirez
  • Le stress aggrave les difficultés
  • Utilisez tous les moyens de communication :

  • Gestes
  • Dessins
  • Écriture
  • Montrer du doigt
  • Il n’y a pas de “triche”, tous les moyens sont bons !
  • Demandez de l’aide :

  • “Parlez plus lentement s’il vous plaît”
  • “Je n’ai pas compris, pouvez-vous reformuler ?”
  • “Laissez-moi le temps de répondre”
  • Préparez les situations difficiles :

  • Téléphone : privilégiez les textos, les mails
  • Achats : préparez une liste écrite
  • Rendez-vous importants : venez accompagné
  • Ayez toujours sur vous :

  • Une carte expliquant votre situation : “J’ai fait un AVC, j’ai des difficultés à parler, merci de votre patience”
  • Un carnet et un stylo
  • Votre téléphone avec des images ou mots fréquents
  • Pour l’entourage

    Adaptez votre communication :

    Ce qu’il faut FAIRE :

  • Parlez lentement et clairement (mais pas fort ! Ce n’est pas un problème d’audition)
  • Utilisez des phrases simples et courtes
  • Posez des questions fermées (oui/non) plutôt qu’ouvertes
  • Laissez du temps pour répondre (comptez jusqu’à 10 dans votre tête avant de relancer)
  • Utilisez des gestes, des images pour accompagner vos paroles
  • Reformulez plutôt que de demander de répéter : “Tu veux dire que… ?”
  • Encouragez, souriez
  • Maintenez le contact visuel
  • Réduisez les distractions (éteindre la télé, parler dans un endroit calme)
  • Ce qu’il ne faut PAS faire :

  • Parler à la place de la personne
  • Finir ses phrases systématiquement
  • Parler de la personne comme si elle n’était pas là
  • Infantiliser (“Tu veux du gâteau ? Dis ‘gâteau’ !”)
  • S’impatienter visiblement
  • Corriger systématiquement les erreurs
  • Faire semblant de comprendre alors que ce n’est pas le cas
  • Éviter de communiquer par peur de mal faire
  • Important : la personne aphasique comprend souvent beaucoup mieux qu’elle ne parle. Ne supposez pas qu’elle ne comprend pas tout simplement parce qu’elle ne peut pas répondre.

    Impliquez la personne dans les conversations :

  • Ne l’excluez pas des discussions familiales
  • Demandez son avis (même si c’est juste un oui/non)
  • Racontez-lui votre journée
  • Maintenez le lien social
  • Guide pour accompagner les personnes post-AVC

    Pour les proches aidants, le guide DYNSEO pour accompagner les personnes après un AVC contient un chapitre complet sur la communication avec une personne aphasique. Vous y apprendrez :

  • Comment adapter votre façon de parler
  • Comment comprendre ce que veut dire votre proche malgré les difficultés
  • Comment l’aider sans le dévaloriser
  • Comment maintenir le lien affectif malgré les barrières de langage
  • Comment prendre soin de vous en tant qu’aidant face à ces difficultés
  • Les aides techniques et technologiques

    Applications et logiciels

    Applications d’orthophonie :

  • Nombreuses applications disponibles sur tablettes pour travailler le langage
  • Demandez conseil à votre orthophoniste
  • Synthèse vocale :

  • Si vous ne pouvez vraiment plus parler, des applications permettent de taper du texte qui sera lu par une voix synthétique
  • Applications : Proloquo2Go, Predictable, TD Snap
  • Communication par pictogrammes :

  • Applications avec des images que vous pouvez pointer pour communiquer
  • Utile en phase aiguë ou pour les aphasies très sévères
  • Outils classiques

    Classeur de communication :

  • Cahier avec des images classées par thèmes (nourriture, vêtements, activités, émotions, personnes)
  • Vous pointez l’image pour communiquer
  • Votre orthophoniste peut vous aider à en créer un personnalisé
  • Cartes de communication :

  • Petites cartes avec des phrases utiles : “Je ne comprends pas”, “Parlez plus lentement”, “Oui”, “Non”
  • Tableau alphabétique :

  • Pour épeler les mots en pointant les lettres
  • Utile si vous pouvez écrire mais pas parler
  • Programme d’entraînement type

    Semaine type pour un patient avec aphasie de Broca (difficulté d’expression)

    Lundi :

  • Matin : 15 min – Dénomination d’images + chant
  • Soir : 15 min – Compléter des phrases + écriture
  • Mardi :

  • Séance d’orthophonie (45 min)
  • Soir : 10 min – Exercices donnés par l’orthophoniste
  • Mercredi :

  • Matin : 15 min – Dénomination + automatismes (compter, jours de la semaine)
  • Soir : 20 min – Lecture à voix haute
  • Jeudi :

  • Séance d’orthophonie (45 min)
  • Soir : 10 min – JOE (application)
  • Vendredi :

  • Matin : 15 min – Écriture (journal) + dénomination
  • Soir : 30 min – Conversation avec un proche sur un sujet choisi
  • Samedi :

  • Matin : 15 min – Lecture à voix haute
  • Après-midi : Jeux de société en famille (Scrabble, Pictionary)
  • Dimanche :

  • Matin : 10 min – Chant + automatismes
  • Repos léger l’après-midi (activités de loisir sans pression)
  • Total : environ 2h30 par semaine en dehors des séances d’orthophonie.

    Les facteurs qui favorisent la récupération

    Facteurs contrôlables (sur lesquels vous pouvez agir)

    Régularité de l’entraînement :

  • Tous les jours, même 10 minutes
  • Ne sautez pas de jours
  • Motivation et état d’esprit positif :

  • Croyez en votre capacité à progresser
  • Célébrez les petites victoires
  • Ne vous comparez qu’à vous-même
  • Soutien familial et social :

  • Entourez-vous de personnes bienveillantes
  • Rejoignez un groupe de parole (France AVC propose des groupes pour aphasiques)
  • Ne vous isolez pas
  • Hygiène de vie :

  • Sommeil suffisant (le cerveau se répare pendant le sommeil)
  • Alimentation équilibrée
  • Activité physique (améliore la neuroplasticité)
  • Éviter l’alcool et le tabac
  • Gestion du stress :

  • Le stress aggrave les difficultés de langage
  • Techniques de relaxation, cohérence cardiaque, méditation
  • Stimulation cognitive générale :

  • Lisez, écoutez la radio, regardez des documentaires
  • Maintenez vos activités intellectuelles
  • Utilisez des applications comme JOE
  • Facteurs non contrôlables (mais à connaître)

  • Âge (les jeunes récupèrent généralement mieux, mais les progrès sont possibles à tout âge)
  • Taille et localisation de la lésion
  • Présence d’autres pathologies
  • Délai avant le début de la rééducation
  • Même si ces facteurs sont défavorables, ne perdez pas espoir : des progrès restent possibles !

    Gérer les émotions et les difficultés psychologiques

    Accepter la frustration

    L’aphasie est profondément frustrante. Savoir ce qu’on veut dire sans pouvoir le dire est épuisant et dévaloris

    ant.

    C’est normal de ressentir :

  • De la colère
  • De la tristesse
  • De la honte
  • Du découragement
  • Comment gérer :

  • Acceptez ces émotions comme légitimes
  • Parlez-en (même maladroitement) à vos proches, à un psychologue
  • Pleurez si vous en avez besoin
  • Ne restez pas seul avec ces émotions
  • Éviter l’isolement social

    La tentation est grande de se retirer, d’éviter les interactions pour ne pas affronter les difficultés.

    Mais l’isolement aggrave tout :

  • Moins de stimulation = moins de récupération
  • Augmente le risque de dépression
  • Perte de motivation
  • Stratégies pour maintenir le lien social :

  • Voyez des amis un par un (plus facile qu’en groupe)
  • Privilégiez des activités où la parole n’est pas centrale (marche, jardinage, jeux)
  • Expliquez votre situation aux personnes qui comptent
  • Rejoignez un groupe de patients aphasiques
  • La dépression post-AVC

    30% des patients font une dépression après un AVC. Si vous ressentez :

  • Tristesse persistante
  • Perte d’intérêt pour tout
  • Fatigue intense
  • Troubles du sommeil
  • Pensées noires
  • Consultez ! La dépression se soigne très bien :

  • Antidépresseurs si nécessaire
  • Psychothérapie
  • Soutien de l’entourage

Témoignages : ils ont repris la parole

Témoignage de Jean, 65 ans, aphasie de Broca

“Après mon AVC, je ne pouvais plus dire que ‘oui’ et ‘non’. C’était l’enfer. Je voyais ma femme parler et je ne comprenais même pas si c’était du français. Avec l’orthophoniste, on a commencé très simplement : montrer des images, essayer de dire le nom. Au début, rien ne sortait. Puis, un jour, j’ai dit ‘table’. J’ai pleuré. Ça a été long, très long. Six mois, un an. Aujourd’hui, deux ans après, je ne parle pas parfaitement, j’ai encore des difficultés à trouver mes mots, mais je communique. Je peux avoir une conversation. Je peux dire à ma femme que je l’aime. C’est énorme.”

Témoignage de Sophie, 58 ans, dysarthrie

“Ma parole était très pâteuse, on ne me comprenait pas. J’avais tellement honte que je ne parlais plus. L’orthophoniste m’a fait faire des exercices de la bouche, articuler des sons, des syllabes. Ça semblait ridicule au début. Mais petit à petit, ma bouche a répondu mieux. Aujourd’hui, les gens me comprennent. Je dois encore articuler beaucoup, parler lentement, mais je me fais comprendre. Et ça, c’est la liberté.”

Témoignage de Marie, 72 ans, aphasie légère

“Mes troubles étaient légers, je trouvais parfois pas mes mots, j’inversais des syllabes. Mais ça me gênait énormément. L’orthophoniste m’a rassurée : c’était normal, ça allait s’améliorer. On a travaillé sur des exercices de dénomination, de lecture. J’ai aussi utilisé l’application JOE tous les jours. Au bout de 6 mois, c’était beaucoup mieux. Aujourd’hui, un an après, mes proches ne remarquent même plus mes difficultés. Moi je sais qu’elles sont là, mais elles ne me handicapent plus.”

Conclusion : la parole peut revenir

Les troubles du langage après un AVC sont une épreuve difficile, bouleversante, frustrante. Mais ils ne sont pas une fatalité. Avec une rééducation précoce, intensive, régulière, et beaucoup de persévérance, des progrès significatifs sont possibles.

Les clés du succès :

1. Commencez tôt : dès que possible, consultez un orthophoniste

2. Soyez régulier : pratiquez tous les jours, même 10-15 minutes

3. Variez les exercices : pour stimuler différents aspects du langage

4. Impliquez votre entourage : leur soutien est essentiel

5. Utilisez tous les moyens : parole, gestes, écriture, images, applications

6. Soyez patient : les progrès sont progressifs

7. Gardez espoir : même après un an, des améliorations restent possibles

8. Ne vous isolez pas : maintenez les liens sociaux

9. Gérez vos émotions : n’hésitez pas à consulter un psychologue

10. Célébrez chaque progrès : chaque mot retrouvé est une victoire

Vous n’êtes pas seul. Les orthophonistes, les associations comme France AVC, les outils comme la formation DYNSEO, l’application JOE, et le guide pour les proches sont là pour vous accompagner.

Votre voix peut revenir. Vos mots peuvent revenir. Commencez dès aujourd’hui. Un exercice, un mot à la fois. Vous pouvez le faire. 💬

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